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A la galerie Tretiakov, grand musée du centre de Moscou, vient à peine de se terminer le championnat du Monde d'échecs entre Vishvanathan Anand et Boris Guelfand, représentants d'Inde et d'Israël. Dans l'indifférence générale, il faut bien le dire. L'entrée était gratuite et l'organisation à la hauteur de l'évènement, pourtant la salle n'a jamais fait le plein. Dommage.
Tout joueur d'échecs vous le dira : c'est une activité qui traverse une crise. Sans doute est-ce le seul sport dans lequel les retraités sont bien plus connus que le champion du Monde lui-même. Qui ne sait qui est Kasparov ? Qui avait entendu parler d'Anand avant de venir sur ce blog ?
A la décharge des champions constatons que le public est de moins en moins attiré par les activités cérébrales. Le temps n'est plus à la réflexion malheureusement. Nous n'avons plus le temps pour cela.
A la décharge du public, constatons que ces deux-là ont donné un spectacle ennuyeux à en mourir (dix nulles sur douze parties, dont neuf furent aussi rapides que soporifiques). Comment voulez-vous attirer l'attention du plus grand nombre en jouant comme un grand-père dans un club de campagne ? (tout mon respect si l'un d'eux me lit).
Anand a gagné le match grâce à une victoire sur quatre en départages rapides. Ce fut malgré tout un plaisir d'assister à un championnat du Monde (c'était une première pour moi !) et de ressentir cette pression qui nous rappelle que les échecs s'apparentent à un match de boxe mental.
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Cette chanson fut écrite en 1986, soit en pleine Perestroïka, et la critique du système soviétique auquel il reste si peu de temps (à peine cinq ans) est évidente. A noter que le crépuscule rose de la chanson, au départ, était un crépuscule marron, référence au nazisme. Cela n'a bien entendu pas passé la censure.
Et pourtant, lorsque j'écoute ce morceau, j'ai l'étrange sensation que ces paroles n'appartiennent pas au passé, qu'elles ne font pas référence à un système politique particulier, et qu'elle nous parle de nos vies, de ce qu'est la société de nos jours : nous sommes tous attachés par une même chaîne, et liés par un même but.
Je m'étais promis de ne pas parler politique sur mon blog, cette chanson l'est complètement, mais je la trouve très profonde, elle appelle à la réflexion à chaque ligne, et fait à part entière partie du patrimoine russe/soviétique. Il aurait donc été dommage de vous en priver. Le groupe est Nautilus Pompilius, l'un de mes groupes préférés, comme vous l'aurez compris si vous avez un peu flâné sur ce blog.
Наутилус Помпилиус - Скованные одной цепью -
La responsabilité collective salit comme la suie,
Je saisis la main d'un autre et sens un coude
Je cherche les yeux je rencontre un regard
Là, le derrière est au-dessus des têtes
Et à l'aurore rouge suit un crépuscule rose
Nous sommes tous attachés par la même chaîne, tous liés par un même but
Nous sommes tous attachés par la même chaîne, tous liés par un même but
Ici les articulations sont molles et l'espace est énorme,
ici les effectifs sont broyés pour faire des camps de travail
On a un discours pour la cuisine et un autre pour la rue,
Ici les aigles sont abandonnés au profit des poulets de chair
Et même en les embrassant je suis sur le même alignement que ceux qui sont
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but
On peut croire sans avoir la foi
On peut faire sans avoir la moindre chose à faire
Les plus pauvres bénissent le fait
que leur pauvreté est garantie
Ici on peut jouer pour soi de la trompette
Mais quoi que tu joues tu joueras toujours le signal de la retraite,
Et s'il y en a qui viennent te voir,
Il s'en trouvera toujours qui viennent te chercher
Tout autant que toi
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but,
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but
Ici les femmes cherchent mais ne trouvent que la vieillesse
Ici l'étalon du travail est considéré comme étant la fatigue
Ici il n'y a pas de salopards dans des cabinets de cuir
Ici les premiers ressemblent aux derniers
Et ceux-ci ne sont peut-être pas plus fatigués, sans doute, d'être
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but
Tous attachés par une même chaîne, tous liés par un même but
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Il s'agit d'un fait divers tout ce qu'il y a de plus banal, rien à voir avec les informations de premières pages, les discours des politiques et les terribles nouvelles économiques qui font trembler l'Europe : au début de l'année un homme a été retrouvé mort, seul, chez lui, et, détail morbide, son décès datait de plusieurs mois. Voici le Monde dans lequel nous vivons, le petit écran nous transporte d'un bout à l'autre de la terre et appelle en nous toute l'empathie dont nous sommes capables. Au final, on en oublie ceux qui, dans leur solitude, vivent de l'autre côté de notre porte. Ce n'est pas une question de nationalité : nous habitons tous "La ville de l'amour fraternel". Chanson :04.Наутилус Помпилиус Город братской любви. - YouTube
Et traduction ci-dessous :
La voisine dira qu'ils sont venus
Et ont trouvé la convocation dans le trou de la serrure,
La voisine dira qu'ils ont sonné
mais n'ont pas attendu les pas du vieillard.
Demande de paiement ridicule dans une enveloppe officielle
Pour une veilleuse que le mort avait oublié d'éteindre
Il ne pourra plus nous fuir après la mort
Tant que nous nous souvenons qu'il est notre débiteur
Nous habitons la ville de l'amour fraternel
On se souvient de nous tant que nous gênons
Nous vivons dans la ville de l'amour fraternel,
L'amour fraternel, l'amour fraternel
La voisine dira qu'il était casanier
Et qu'il gémissait très fort durant la nuit,
qu'il ne suivait pas ses bons conseils,
Et n'appelait jamais le médecin.
La voisine dira que personne ne l'aimait beaucoup
Mais que personne ne se souvenait pourquoi et à cause de quoi
La voisine dira combien facilement tous ont oublié
le piteux fantôme dans son manteau ridicule
Nous vivons dans la ville de l'amour fraternel
On se souvient de nous tant que nous gênons
Nous vivons dans la ville de l'amour fraternel,
l'amour fraternel, l'amour fraternel.
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Si vous ne connaissez pas ces films, vous êtes pardonnés, par contre impossible de se dire spécialiste de la Russie sans les avoir vus, ce sont des incontournables, et tout russophile doit passer par là ou sinon, il n'est pas complètement des leurs. Et donc, pour parfaire votre culture entre un verre de vodka et quelques zakouski au caviar :
1/ La prisonnière du Caucase : (Leonid Gaidai, 1966)
L'histoire de Nina, faite prisonnière par une bande du Caucase, et sauvée par un ingénieur de polytechnique est, étrangement (le film n'est somme toute pas un chef-d'oeuvre) devenu l'un des films les plus vus par les russes. La comédie est légère, et elle est, évidemment, un incontournable. La caricature des caucasiens est à peine poussée, tant les peuples transcaucasiens sont expansifs et chaleureux. Voici l'une des chansons du film, passé dans le répertoire nationale et populaire (si j'étais un sultan) :Если б я был султан - полная версия - YouTube
2/ L'ironie du sort : (Edgard Riazanov, 1976)
Un 31 décembre, le moscovite Jenia (diminutif d'Evgueni) va dans un bain russe et boit un peu trop. Par un concours de circonstances, il se retrouve dans un avion pour Leningrad (actuelle Saint-Petersbourg), sans s'apercevoir de rien il donne son adresse à un taxi, et se retrouve ce qu'il croit être son chez lui alors qu'il est chez une jeune femme. S'ensuit un des huis-clos les plus fameux du cinéma russe. Cette comédie est absolument incontournable tous les 31 décembre en Russie. A noter qu'une suite a été tournée il y a quelques années. Cela me plait que vous ne soyez pas malade de moi : Мне нравится что вы больны не мною - YouTube
3/ Quand passent les cigognes : (Mikhail Kalatozov, 1957)
La guerre éclate, et Véronique et Boris sont séparés. Lui part au combat, elle est envoyée à l'est comme beaucoup de femmes et d'enfants à cette époque. Elle officie comme infirmière, garde l'espoir de revoir Boris, mais épouse Marc, qui a joué de ses relations pour échapper au front. Leur histoire a été récompensée d'une palme d'or au festival de Cannes en 1958, et mérite vraiment que l'on regarde ce magnifique film si émouvant :Летят журавли ("The cranes are flying") trailer - YouTube
4/ Une gare pour deux : (Edgard Riazanov, encore lui ! 1982)
Un condamné qui doit se rendre à son procès veut déjeuner à un buffet de gare alors que le train qui doit l'amener à Moscou fait une pause de vingt minutes. Comme il ne touche pas à la nourriture qu'il trouve infâme, il refuse de payer, mais est arrêtée par une serveuse et un policier. Bref, il se retrouve coincé dans cette station, au milieu de nulle part, son train parti sans lui. De là va commencer à se nouer une relation bien particulière entre lui et la serveuse. Film touchant, humain, comme tout ce que fait Riazanov :Вокзал для двоих (фантрейлер) - YouTube
Il y en a bien entendu bien d'autres, que je me ferai un plaisir de vous faire découvrir bientôt !
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Il faut habiter à Moscou pour comprendre ce plaisir là de se promener, l'été, au bord de la Moskova, à manger une glace, et à apprécier, comme personne au monde parce qu'ici plus qu'ailleurs le temps est toujours, ou presque, hostile, le soleil qui brille et le reflet de ses rayons sur la rivière.
Il faut habiter ici pour comprendre ce bonheur là d'un taxi-bus qui vous amène, pour la journée, hors de la ville, lorsqu'au bout d'à peine une après-midi, la ville-héros vous manque déjà, vous qui la critiquiez encore hier.
Il faut être moscovite pour apprécier un dimanche à la campagne, ou presque, dans un des immenses parcs de la ville, lorsque vous êtes perdu en plein milieu d'une forêt et pourtant presque au centre-ville.
Il faut vivre ici pour apprécier cette âme slave, et russe, si désagréable parfois, si touchante et attahante souvent.
Cette chanson est pour toi, Moscou :
Моя любовь Москва.wmv - YouTube
Tout juste une heure avant le prochain train pour Moscou,
Et cette heure je vais la passer si loin de vous,
Dans un tel vide, une telle transparence
Que l'on pourrait toucher l'horizon de la main.
Dans ma ville adorée je descendrai à Textilchiki (1)
Le wagon bleu se balancera sur ses essieux dorés (2)
Serré par une foule désordonnée je sortirai sur la rivière
Et enfin poserai ma joue contre ta joue.
Où donc me cacher de notre Amour capricieux, Moscou ?
Sur les cils de tes fils brille une lumière humide.
Dans les tours brillent des feux
Et cela veut dire que nous protège encore
Ton amour, Moscou.
Nous volons au dessus de la rivièreEt de la brume grise,
Et comme d'habitude tes parfums rappellent l'odeur de la fumée.
Un époustouflant feu d'artifice tonne,
Et on ne peux plus attendre :
Dans les maisons on joue d'un instrument et on chante,
la nuit tombe.
Et ton murmure fou
coule sur ton visage,
et pulse la boucle de ta ceinture de boulevards.
Capitale de mon bonheur et de ma jalousie,
On a encore une chance pour le dernier métro,
Courons, vite !
Nulle part où se cacher de ton capricieux amour, Moscou !
Amoureux que je suis de la capitale, je sais que même dans tes caprices tu as raison.
L'Aurore brille sur les tours,
Et j'ai l'impression qu'encore une fois va nous sauver
Ton Amour, Moscou !
NDT :
(1) Textilchiki est un quartier, et une station de métro dans le sud-est de Moscou.
(2) Les wagons de métro sont pour la plupart bleus à Moscou.
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